10 avril 2007
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Il s'agit du dossier du mois de Mars 2007 paru dans Vie de famille, le magazine de votre caf. Comme il s'agit du magazine édité par la caf du Loiret, je ne sais si vous pouvez lire le même dossier dans le magazine de votre département. Aussi je vais publier l'article en entier mais en plusieurs fois.
Dossier réalisé par ELISE JEANNE.
"Souffrances familiales : comment rebondir ?
Elles sont intenses et se transmettent souvent aux descendants. Pourtant, malgré leur poids, il est possible de se libérer des souffrances familiales. Enquête aurpès de ceux qui ont "réinventé" leur vie."
Nous souhaiterions que la famille ne soit qu'un creuset d'amour, de protection, de réconfort. Mais voilà : elle est aussi parfois une arène où l'on se fait mal les uns aus autres. La souffrance est intense, déstabilisante et l'on sait rarement quoi en faire.
"L'idéalisation de la famille sert à masquer le fait qu'il y a aussi en son sein des affects violents, de la colère, de la haine, etc." assène Daniel Marcelli, professeur de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent. Vivre ensemble est difficile. Partager ses émotions aussi - et beaucoup plus qu'on ne veut bien le croire ! Ce qui n'arrange rien. "Plus les êtres humains sont touchés dans leurs émotions, plus ils sont vulnérables, plus ils ont tendance à être maladroits", décrypte Daniel Marcelli. Si la famille est pourtant le lieu des émotions, elle est également l'univers où nous sommes confrontés à nos liens de dépendances à notre entourage : "Dans notre monde moderne, chaque individu a l'illusion de croire qu'il peut faire ce qu'il veut, quand il veut, comme il veut. Mais il s'aperçoit que, en famille, cela n'est pas possible." Daniel Marcelli pointe une autre explication à l'essor de tensions familiales : "La famille est aussi le lieu de prédilection, précisément à cause des autres. Si je suis déprimée, ce n'est pas moi qui le suis, c'est mon enfant ou mon mari qui va mal et qui me rend déprimé. Si je bois, c'est à cause de ma femme, etc." Une manière peut-être pratique de se dédouaner, mais source de désordres importants. Ainsi, "parce que la vie familiale demeure fortement investie par les individus, elle génère bien souvent des attentes fortes qui restent peu ou mal satisfaites. Elle est alors jalonnée d'étapes (naissance, scolarité, adolescence, départ de l'enfant, rupture du couple ...) qui peuvent se révèler comme autant de crises ou de pannes, faisant apparaître des symptômes - signes de souffrance ou de malaise - et de disfonctionnements relationnels (conflits incessants, violences verbales et/ou physiques, sentiments de ne pas être compris, difficulté à s'affirmer en tant que parent)", complète le Centre d'études cliniques de communications familiales (Ceccof) sur son site internet.
S'alléger du poids de notre héritage familial
Autre paramètre à prendre en considération : le fait que chacun de nous soit pris dans une histoire et que nos histoires de famille soient en partie déterminées par notre "héritage". les problèmes familiaux non résolus, les blessures qui n'ont pu être dites ou entendues, les secrets que l'on croit à tort hermétiquement cachés, les affects qui réinscrivent constamment un drame dans la vie de certains individus et de leur filiation ... tous traumatismes non "digérés" sont susceptibles de causer des difficultés car ils fragilisent les piliers de l'édifices familial. Le sentiment provoqué par un événement déstabilisant peut passer d'une génération à l'autre. "On se refile la patate chaude", en quelque sorte. Et ce, même si nous n'en avons pas vraiment conscience ou une connaissance exacte.
L'influence de l'inconscient familial sur notre exsitence est-elle pour autant irrésistible ? Notre vie condamnée à prendre une direction non véritablement voulue ? Les séquences de souffrances familiales forcément répétitives ? Où est-il possible de rompre le cycle, de comprendre, de rebondir et d'aller son petit bonhomme de chemin ? Ce qui est certain, c'est qu'une aide extérieure se révèle très souvent nécessaire pour enclencher un processus de changement, pour repérer les ressources, en nous ou autour de nous, que nous allons être en mesure d'activer. Ne l'oublions jamais : c'est dans la relation aux autres que l'on se construit, que l'on peut prendre sa vie en main. Tout seul, nous n'y arriverons probablement pas.
Maryse Vaillant connaît bien cette problématique. Professionnellement parlant : psychologue, elle a beaucoup travaillé sur les notions de réparation et de pardon. Personnellement aussi : "je suis issue d'une famille blessée, torturée, violente, dans laquelle les gens ont souffert, sont morts jeunes, dans la misère, l'alcoolisme ... j'a hérité, à travers ma mère, la violence qu'avait subie sa mère", confie-t-elle. Son expérience personnelle, racontée dans Il m'a tuée et Vivre avec elle et ses pratiques professionnelles lui ont montré que le "seul moyen de guérir de sa famille consiste à accepter d'avoir souffert. Je n'ai pas transmis à ma fille la totalité de la morbidité familiale, qui m'a été transmise. J'ai eu la possibilité de changer la donne et je vais plutôt bien". Reste que, comme le soulinge Daniel Marcelli, "plus les êtres humains sont pris dans des liens compliqués avec leur histoire antérieure, plus ils risquent de reproduire un peu les mêmes complications, consciemment ou non". Pour lui, "la pire des reproductions" consiste - aussi paradoxal que cela puisse nous paraître - à vouloir éviter à tout prix de refaire ce que l'on a vécu dans notre enfance.
Nous pensons ainsi chasser le diable de notre maison, mais il rentrera par la fenêtre ! Les fantômes du passé sont puissants ... et destructeurs. Penser nous en protéger en les enfouissant au fond de notre mémoire ou en coupant les ponts avec notre famille paraît une entreprise assez vaine. Les blessures psychoaffectives, les conflits, les ruptures, entre autres, finissent par nous rattraper. Le plus souvent "au moment des points chauds familiaux : naissance d'un enfant, adolescence des enfants, départ des enfants ... c'est-à-dire à chaque moment où les liens doivent se remanier", avertit Daniel Marcelli.
Dossier réalisé par ELISE JEANNE.
"Souffrances familiales : comment rebondir ?
Elles sont intenses et se transmettent souvent aux descendants. Pourtant, malgré leur poids, il est possible de se libérer des souffrances familiales. Enquête aurpès de ceux qui ont "réinventé" leur vie."
Nous souhaiterions que la famille ne soit qu'un creuset d'amour, de protection, de réconfort. Mais voilà : elle est aussi parfois une arène où l'on se fait mal les uns aus autres. La souffrance est intense, déstabilisante et l'on sait rarement quoi en faire.
"L'idéalisation de la famille sert à masquer le fait qu'il y a aussi en son sein des affects violents, de la colère, de la haine, etc." assène Daniel Marcelli, professeur de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent. Vivre ensemble est difficile. Partager ses émotions aussi - et beaucoup plus qu'on ne veut bien le croire ! Ce qui n'arrange rien. "Plus les êtres humains sont touchés dans leurs émotions, plus ils sont vulnérables, plus ils ont tendance à être maladroits", décrypte Daniel Marcelli. Si la famille est pourtant le lieu des émotions, elle est également l'univers où nous sommes confrontés à nos liens de dépendances à notre entourage : "Dans notre monde moderne, chaque individu a l'illusion de croire qu'il peut faire ce qu'il veut, quand il veut, comme il veut. Mais il s'aperçoit que, en famille, cela n'est pas possible." Daniel Marcelli pointe une autre explication à l'essor de tensions familiales : "La famille est aussi le lieu de prédilection, précisément à cause des autres. Si je suis déprimée, ce n'est pas moi qui le suis, c'est mon enfant ou mon mari qui va mal et qui me rend déprimé. Si je bois, c'est à cause de ma femme, etc." Une manière peut-être pratique de se dédouaner, mais source de désordres importants. Ainsi, "parce que la vie familiale demeure fortement investie par les individus, elle génère bien souvent des attentes fortes qui restent peu ou mal satisfaites. Elle est alors jalonnée d'étapes (naissance, scolarité, adolescence, départ de l'enfant, rupture du couple ...) qui peuvent se révèler comme autant de crises ou de pannes, faisant apparaître des symptômes - signes de souffrance ou de malaise - et de disfonctionnements relationnels (conflits incessants, violences verbales et/ou physiques, sentiments de ne pas être compris, difficulté à s'affirmer en tant que parent)", complète le Centre d'études cliniques de communications familiales (Ceccof) sur son site internet.
S'alléger du poids de notre héritage familial
Autre paramètre à prendre en considération : le fait que chacun de nous soit pris dans une histoire et que nos histoires de famille soient en partie déterminées par notre "héritage". les problèmes familiaux non résolus, les blessures qui n'ont pu être dites ou entendues, les secrets que l'on croit à tort hermétiquement cachés, les affects qui réinscrivent constamment un drame dans la vie de certains individus et de leur filiation ... tous traumatismes non "digérés" sont susceptibles de causer des difficultés car ils fragilisent les piliers de l'édifices familial. Le sentiment provoqué par un événement déstabilisant peut passer d'une génération à l'autre. "On se refile la patate chaude", en quelque sorte. Et ce, même si nous n'en avons pas vraiment conscience ou une connaissance exacte.
L'influence de l'inconscient familial sur notre exsitence est-elle pour autant irrésistible ? Notre vie condamnée à prendre une direction non véritablement voulue ? Les séquences de souffrances familiales forcément répétitives ? Où est-il possible de rompre le cycle, de comprendre, de rebondir et d'aller son petit bonhomme de chemin ? Ce qui est certain, c'est qu'une aide extérieure se révèle très souvent nécessaire pour enclencher un processus de changement, pour repérer les ressources, en nous ou autour de nous, que nous allons être en mesure d'activer. Ne l'oublions jamais : c'est dans la relation aux autres que l'on se construit, que l'on peut prendre sa vie en main. Tout seul, nous n'y arriverons probablement pas.
Maryse Vaillant connaît bien cette problématique. Professionnellement parlant : psychologue, elle a beaucoup travaillé sur les notions de réparation et de pardon. Personnellement aussi : "je suis issue d'une famille blessée, torturée, violente, dans laquelle les gens ont souffert, sont morts jeunes, dans la misère, l'alcoolisme ... j'a hérité, à travers ma mère, la violence qu'avait subie sa mère", confie-t-elle. Son expérience personnelle, racontée dans Il m'a tuée et Vivre avec elle et ses pratiques professionnelles lui ont montré que le "seul moyen de guérir de sa famille consiste à accepter d'avoir souffert. Je n'ai pas transmis à ma fille la totalité de la morbidité familiale, qui m'a été transmise. J'ai eu la possibilité de changer la donne et je vais plutôt bien". Reste que, comme le soulinge Daniel Marcelli, "plus les êtres humains sont pris dans des liens compliqués avec leur histoire antérieure, plus ils risquent de reproduire un peu les mêmes complications, consciemment ou non". Pour lui, "la pire des reproductions" consiste - aussi paradoxal que cela puisse nous paraître - à vouloir éviter à tout prix de refaire ce que l'on a vécu dans notre enfance.
Nous pensons ainsi chasser le diable de notre maison, mais il rentrera par la fenêtre ! Les fantômes du passé sont puissants ... et destructeurs. Penser nous en protéger en les enfouissant au fond de notre mémoire ou en coupant les ponts avec notre famille paraît une entreprise assez vaine. Les blessures psychoaffectives, les conflits, les ruptures, entre autres, finissent par nous rattraper. Le plus souvent "au moment des points chauds familiaux : naissance d'un enfant, adolescence des enfants, départ des enfants ... c'est-à-dire à chaque moment où les liens doivent se remanier", avertit Daniel Marcelli.